Cinquième de six enfants, Aline Valade se souvient de la violence de son père et de son désir constant de vouloir protéger sa mère.

« Il était alcoolique. On disait que c'était à cause de la boisson, mais ce n'était pas ça, un violent c'est un violent. Je me rappelle du climat de tension entre eux et des disputes le soir. Physiquement, je m'interposais. Mes sœurs et frères sortaient de la maison et moi, je la défendais. »

La famille grandit dans un quartier ouvrier de Montréal et pour la jeune fille qui fait son bout de chemin dans les années soixante, puis soixante-dix, la violence conjugale n'est pas un concept dont elle entendra parler avant l'âge de 36 ans.

« Avant, on n’en parlait pas, la femme était soumise à l'homme alors que la religion catholique était omniprésente et que les femmes devaient toutes faire des sacrifices pour leur famille », observe Mme Valade.

Un jour, la violence de son père atteint un paroxysme. Alors qu'il n'est plus en couple avec sa mère, il assassine sa nouvelle conjointe devant les yeux d'Aline. Un événement qui plongera la jeune femme de 23 ans dans une profonde dépression.

Plusieurs corps, mais un seul homme

Avec le recul ainsi que les nombreuses thérapies et ateliers qu'a suivi la dame aujourd'hui dans la cinquantaine, elle estime que la dépression chez la femme est la conséquence première de la violence subie par celle-ci.

Pour Aline Valade, la dépression a pour effet d'anéantir son estime d'elle-même et de réduire à néant sa confiance.

Même si elle a eu plusieurs amoureux au cours de sa vie, Mme Valade renouait toujours avec un type d'hommes en particulier. « C'était juste le corps qui changeait », image celle qui a subi un viol, une séquestration et plusieurs autres types de violence physique et psychologique.

La voie de la libération

La clé dans le processus de guérison de ses blessures a été d'accepter de travailler sur elle-même et non de comprendre l'autre. « La journée où je me suis regardée aller, je me suis dit que ça n'avait pas d'allure. Je dénonçais la violence, mais je retombais toujours dedans. J'étais complice de ce qu'il faisait. »

C'est donc en 1998 que le début de la libération d'Aline Valade s'est entamé. Et près de 20 ans plus tard, elle estime que son travail n'est pas encore terminé.

« Il faut travailler sur soi, ne pas tolérer de comportements violents et faire une coupure drastique avec la personne violente. Cela peut aussi signifier renoncer aux relations pour quelque temps. »

Celle qui sera de passage à L'Assomption dans quelques jours évoque le drame qui s'est joué à Saint-Hilaire le mois dernier et qui s'est conclu par le meurtre d'une jeune femme de 18 ans.

« Plusieurs font la sourde oreille lorsqu'il est question de violence conjugale, encore aujourd'hui. Mon père n'était pas un cas isolé et ce n'est pas un sujet dont on aime parler. Ça prend du courage pour regarder ça en face. »

Le groupe de discussion Cœur de femmes se rencontrera sous la thématique de la dépression le mardi 2 mai prochain à 19h, à la salle de réception Le Cerf Blanc, située au 1115, boul. L'Ange-Gardien Nord, à L'Assomption.