Briser le silence pour mettre un frein à la violence conjugale

La Sûreté du Québec, le Service de police de la Ville de Repentigny et le Service de police de L'Assomption / Saint- Sulpice se sont unis le temps d'une Opération nationale concertée de sensibilisation à la violence conjugale. (Photo Médialo - Pierre Chartier)
La Sûreté du Québec, le Service de police de la Ville de Repentigny et le Service de police de L’Assomption / Saint- Sulpice se sont unis le temps d’une Opération nationale concertée de sensibilisation à la violence conjugale. (Photo Médialo – Pierre Chartier)

À l’occasion des 12 jours d’action contre la violence faite aux femmes et aux filles, les corps policiers d’un peu partout au Québec tenaient une opération de sensibilisation à la violence conjugale. Dans le secteur, la Sûreté du Québec, le Service de police de Repentigny et le Service de police de L’Assomption / Saint-Sulpice se sont réunis aux Galeries Rive Nord afin d’engager la discussion avec les citoyens. Parallèlement, deux victimes ont accepté de témoigner dans le but d’insuffler l’espoir à toutes celles qui souffrent encore en silence.

« Quand on pense violence conjugale, on pense à violence physique, mais c’est vraiment tout autre. Le mot qui revient maintenant c’est contrôle coercitif; une forme de violence psychologique où la personne va être dénigrée, où on va la suivre, on va avoir le contrôle de ses finances, on va l’isoler », décrit Mehdi Taleb, ressource dédiée aux personnes victimes de violence conjugale au sein du Service de police de L’Assomption / Saint-Sulpice.

(Photo Médialo – Pierre Chartier)

Un fléau qui ne s’essouffle pas

Rencontré par l’Hebdo Rive Nord, l’agent a témoigné de l’importance de poursuivre les efforts de sensibilisation, mais également de mettre en place des ressources pour tisser un filet social autour des victimes, alors que le fléau de la violence conjugale prend des formes insidieuses et poursuit sa montée.

Selon les données compilées par le Service de police de L’Assomption / Saint-Sulpice, le nombre de dossiers en violence conjugale ouverts annuellement a connu une importante croissance entre 2022 (100) et 2025 (162). Le bilan de cette année ne comptabilise pas encore les dossiers ouverts en novembre et ceux qui le seront en décembre.

Si ces chiffres inquiètent, pour Mehdi Taleb, ils sont aussi le reflet d’une meilleure gestion des appels en violence conjugale. D’emblée, les policiers sont mieux formés qu’avant pour intervenir dans ce contexte et son poste de ressource dédiée lui permet d’aller au-devant des victimes pour faire un suivi, une fois la poussière retombée. « Les gens dénoncent plus », se console l’agent Taleb.

C’est notamment le cas de Suzie* et de Karine*. Toutes deux ont vécu de la violence conjugale durant de longues années avant d’oser dénoncer. Elles racontent leur histoire, car elles savent aujourd’hui qu’elles sont des milliers d’autres à vivre la même chose derrière les portes closes.

Agressions verbales, objets fracassés sous le coup de la colère, commentaires désobligeants, contrôle de ses faits et gestes; pour Suzie, les agissements de son conjoint et père de ses enfants étaient devenus la normalité. « Je pense qu’inconsciemment, je le savais, mais mon conscient était beaucoup dans le déni. Pour moi, une séparation c’était inenvisageable pour mes enfants », explique celle qui a longtemps caché la vérité à ces derniers pour les protéger.

Puiser dans ses dernières énergies

Si au fond d’elle, elle savait, son estime faiblissante la faisait inlassablement douter d’elle. Apeurée et exténuée, Suzie a appelé la police, et regretté de l’avoir fait, à maintes reprises. « Il avait toujours des défaites [pour expliquer ses comportements]. J’avais tellement honte de faire déplacer les policiers tout le temps pour ça », raconte-t-elle.

Il aura fallu que des enjeux de consommation se mettent de la partie et que l’agressivité de monsieur commence à se diriger vers les enfants pour que s’en soit assez pour Suzie et qu’elle trouve le courage d’accepter l’aide pour sortir de cet enfer.

Karine en arrive à des conclusions semblables. « À travers les années, on vit en mode survie et on ne se rend plus compte, jusqu’à tant que [ça affecte] notre environnement, notre enfant. C’est là que ça m’a ouvert l’esprit parce que ça avait des répercussions sur mon enfant, sur son évolution. J’étais vraiment désespérée à ce moment-là », confie-t-elle. Violence psychologique, agressions et violences sexuelles; Karine se sentait prisonnière. Elle partageait un toit, une famille, des finances, un emploi avec son bourreau et évoquer la séparation ne faisait qu’envenimer l’atmosphère. « J’ai fini par décider que le dernier épisode était de trop, étant donné que j’ai un enfant à protéger et moi-même », annonce-t-elle. Karine s’est rendue au poste de police et tout comme Suzie, elle a accepté l’aide des ressources policières, mais également celles d’organismes comme Regard en Elle, Rebâtir et le CAVAC.

L’espoir d’un lendemain plus doux

Autant pour Karine que Suzie, le chemin n’a pas été facile et il ne l’est toujours pas complètement. Elles ne se cachent pas d’avoir eu le vertige devant la montagne de procédures qu’implique la dénonciation, d’avoir voulu baisser les bras, revenir en arrière. Cependant, elles lancent un message d’espoir : il y a du beau à travers la tempête et toutes ont en elles, quelque part, la force de se choisir, de dénoncer, de se pardonner et de se façonner une nouvelle vie, plus douce.

Bien que salutaire, le parcours est souvent ardu, prévient finalement Mehdi Taleb : « Il faut accepter le rythme de la personne […] Il y en a qui finissent par enlever leur plainte […] et c’est correct. Il ne faut pas les juger parce que ce sont elles les victimes. Tout ce qu’on peut faire c’est d’être là, les bras ouverts, et leur dire : on va être là la prochaine fois. »

 

*Des noms fictifs ont été utilisés afin de protéger l’identité des victimes.

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